Rémy Chauvin et le darwinisme, par Alain Gagnon…

Décès d’un homme curieux et audacieux : Rémy Chauvin…

Rémy Chauvin

Chauvin est décédé en décembre dernier (2010).  J’avais pour lui une grande admiration et je l’ai cité à quelques reprises dans mes ouvrages.  Il possédait un don rare : celui de la véritable liberté de penser.  Il se fichait de l’opinion dans un milieu — celui des  scientifiques — où les réputations se font et se défont selon que l’on adhère ou non aux dogmes de l’air du temps.

Synthèse biographique :

Rémy Chauvin (1913 – 2009) est un biologiste et entomologiste français, un penseur et un auteur de renom.   On le connaît également connu pour avoir défendu les droits des animaux et pour s’être intéressé à des thèmes comme le paranormal, la voyance, l’ufologie…

Fils de Marie-Louise Tapin, biologiste, il fait ses études secondaires, puis quatre années d’études de médecine, avant d’entrer à la faculté des Sciences de Paris. Il obtiendra son doctorat en sciences naturelles en 1941.

Il deviendra professeur honoraire émérite à la Sorbonne (professeur d’éthologie et de sociologie animale dès 1959) ;  il est aussi membre du CNRS dès 1942 (chargé de recherches, puis maître de recherches en 1946) ;  professeur à l’Office de la recherche scientifique Outre-Mer (Physiologie et Biologie de l’insecte, de 1944 à 1953) ; directeur de recherches à l’INRA au laboratoire de recherches apicoles de Bures-sur-Yvette, de 1948 à 1964 ; professeur de psycho-physiologie générale à la faculté des Sciences de Strasbourg, en 1964 ; et professeur de sociologie animale à l’université René Descartes (Paris V – la Sorbonne).

Fellow de la Société zoologique de l’Inde depuis 1950, puis lauréat de l’Académie des sciences en 1956 (Prix Schenk), il dirigera successivement trois laboratoires dans les années 1960 : le laboratoire de biologie de l’abeille de l’INRA, de 1948 à 1964, le laboratoire de psycho-physiologie de Strasbourg, de 1964 à 1968, et le laboratoire d’éthologie expérimentale de l’École Pratique des Hautes Études à Mittainville, à partir de 1969 (université de Paris). À partir de 1990, il poursuivra ses recherches sur le comportement social des insectes au château d’Ivoy-le-Pré.

Ses travaux sur les insectes et les oiseaux (son épouse Bernadette Muckenstürm le seconde souvent) font autorité. Auteur de plus d’une cinquantaine d’ouvrages –consacrés essentiellement à l’éthologie animale — et de plus de deux cent cinquante articles parus dans des publications scientifiques spécialisées, telles les revues Insectes ou Abeilles et Fleurs (mais aussi dans Question de de Louis Pauwels, entre 1974 et 1977). Il est également membre du conseil de rédaction bruxellois de la Revue internationale Pierre Teilhard de Chardin en 1960, membre du conseil éditorial du Journal of Scientific Exploration, du conseil scientifique de l’Université interdisciplinaire de Paris (UIP) depuis 1995, et membre d’honneur de l’association Plasticités Sciences Arts.

En septembre 1977  il est co-fondateur de la « Ligue française des droits de l’animal ». Il est aussi membre fondateur de la « Ligue internationale des scientifiques pour l’usage de la langue française » (LISULF).  (Et j’abrège…)

Membre de l’équipe journalistique de la célèbre revue Planète, il y côtoiera  Bernard Heuvelmans, Aimé Michel, Jacques Bergier, Louis Pauwels… Il est membre d’honneur de l’Institut métapsychique international (IMI).

Positions sur le darwinisme :

Rémy Chauvin, s’inscrivant dans une tradition française auprès de Pierre-Paul Grassé et Piveteau, se montre très critique à l’égard du darwinisme et de la sociobiologie. Voici un résumé de ses positions développées principalement dans trois ouvrages  (Dieu des fourmis, Dieu des étoiles ; La biologie de l’Esprit ; Le darwinisme ou la mort d’un mythe) :

— Le néodarwinisme est un ensemble de tautologies (par exemple la sélection naturelle prédit la survivance du plus apte.  Or quel est le plus apte ? Celui qui survit !).
— La vie se caractérise par une immense adaptabilité à des variations très étendues de milieux.
— L’étroitesse de l’adaptation, c’est la mort (ex : le panda, ne se nourrissant que de bambous, est condamné à mort à plus ou moins long terme).
— À côté d’un dispositif compliqué, on peut souvent en trouver un plus simple à proximité qui fonctionne apparemment aussi bien.
— L’Évolution s’intéresse au but et non aux moyens qui peuvent être très différents (ex : l’aile et le vol).
— Le milieu n’est sélectif que dans un très petit nombre de cas.
— L’Évolution est dirigée. C’est un programme interne qui se déroule et qui ne revient pas en arrière. Le but visé semble être le plus haut psychisme possible.  — L’Évolution va dans une direction et pas dans une autre… il est évident que l’univers est orienté.

Critiques des scientifiques à l’égard de Chauvin :

Rémy Chauvin a été l’objet de nombreuses critiques de la part d’autres scientifiques parce qu’il aurait fait appel à des notions mystiques (le Démiurge et la Volonté diffuse dans La biologie de l’Esprit), et s’attaquerait plus à une caricature du darwinisme qu’au darwinisme même. On l’accuse aussi de renforcer, par ses critiques, le créationnisme  — bien que Rémy Chauvin, notons-le bien, ait été un évolutionniste convaincu.

Critiques des sceptiques :

Son intérêt pour la parapsychologie et l’ufologie lui a attiré les critiques des sceptiques. Dans son ouvrage À l’écoute de l’au-delà, il prend position en faveur de la Trans-Communication Instrumentale — recherche de communication avec les morts au moyen de la technologie moderne. Il lui est reproché de faire appel à la notion maçonnique d’égrégore pour expliquer le phénomène ovni.  De plus, les sceptiques lui reprochent une proximité d’esprit avec la revue Planète et l’ouvrage Le Matin des Magiciens de Jacques Bergier et de Louis Pauwels.


Œuvres (quelques suggestions : bibliographie très incomplète)

Vie et mœurs des insectes, éd. Payot, 1956
Dieu des savants, Dieu de l’expérience, éd. Mame, 1958
Le comportement social des animaux, éd. PUF, 1961
Les sociétés animales, de l’abeille au gorille, éd. Plon, 1963
Nos pouvoirs inconnus (sous le pseudo de Pierre Duval, + Jacques Bergier), éd. Planète (coll. Encyclopédie Planète), 1966, rééd. CGR (revue et corrigée), 1997
Le monde des insectes, éd. Hachette, 1967
Le monde des fourmis, éd. Plon 1969, rééd. du Rocher 1994, complétée
Certaines choses que je ne m’explique pas , éd. CELT, 1976 ; rééd. Famot, 1982 (Edition revue et corrigée de « La science devant l’étrange »)
Les abeilles et moi, éd. Hachette, 1976
Le monde animal et ses comportements complexes (+ Bernadette Chauvin), éd. Plon, 1977
La biologie de l’esprit, éd. du Rocher, 1985 (Je vous le recommande.  A.G.)
Le monde des oiseaux, éd. du Rocher 1996
Le darwinisme ou la fin d’un mythe, coll. « L’Esprit et la Matière », éd. du Rocher, 1997
A l’écoute de l’au-delà (+ père F. Brune), éd. Lebeaud, 1999 (remise en forme de « En direct de l’au-delà »)
Le bal des abeilles, tome 1, éd. du Goral, 2001 (bande dessinée, scénario RC, dessins de Patrice Serres
Le bal des abeilles, tome 2 « Le parfum des fleurs de café », éd. du Goral, 2002 (trilogie prévue)

6 Responses to Rémy Chauvin et le darwinisme, par Alain Gagnon…

  1. Michel THYS dit :

    Chauvin aurait-il été inconsciemment influencé par les traces qu’une éducation religieuse aurait laissées dans son cerveau émotionnel, et qui auraient anesthésié son cerveau rationnel, et donc son esprit critique, du moins dès qu’il est question de religion ?
    Mixchel THYS Waterloo http://michel.thys.over-blog.org

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  2. Alain Gagnon dit :

    En faisant appel à l’inconscient, on peut accuser n’importe qui de n’importe quoi. Impossible de se défendre ou de défendre l’accusé.
    Un peu comme dans les années 50… Lorsqu’on accusait un citoyen américain d’être communiste et que ce citoyen le niait, les anticommunistes répondaient : « Évidemment, il nie. C’est dans la tactique des communistes de nier l’être… Ça prouve donc qu’il l’est !»

    Merci de votre commentaire.

    Alain G.

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  3. Jean-Marc Ouellet dit :

    J’apprends cette nouvelle par vous. ( Une autre preuve de la raison d’être de votre blogue) . La perte de Rémy Chauvin est grande. C’est un scientifique-auteur que j’avais lu, et que j’estimais, pas nécessairement parce que j’étais d’accord avec toutes ses positions, mais parce qu’il apportait des remises en question essentielles. Que sait-on sur le paranormal? Que sait-on sur la vie ailleurs, outre cette terre? Un peu scientifique moi-même, darwiniste par conviction, sceptique en ufologie, je me permets de considérer les approches alternatives. La Vérité a besoin de toutes les visions.

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    • Alain Gagnon dit :

      Bonjour à Vous,

      Vous avez absolument raison : « La Vérité a besoin de toutes les visions. » Et la vérité n’a pas peur de la curiosité d’un Chauvin qui la traque partout où il croit pouvoir en trouver traces.
      Ce que la Vérité craint, c’est la frilosité des orthodoxies rentières. Lorsqu’on croit l’avoir trouvée et qu’on cesse de la chercher, elle se dissout et ne demeurent que des ombres, car elle est inaccessible à l’humain dans son intégralité, donc elle demeure toujours un projet, une tension vers…, une recherche.

      Bonne journée.

      Alain G.

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  4. Michel THYS dit :

    Suite à ma brève intervention du 16 janvier, et aux réponses d’Alain GAGNON et Jean-Marc OUELLET, j’ai lu l’intéressante introduction du livre de Rémy CHAUVIN « Le darwinisme ou la fin d’un mythe ».
    J’avais a priori été étonné que ce biologiste évolutionniste « aurait fait appel à des notions mystiques » et j’avais donc supposé quelque réminiscence inconsciente d’une influence religieuse précoce. Sa biographie mentionne en effet qu’il a fait ses études secondaires au Collège de Laval, qui « depuis 120 ans, est fidèle à l’esprit des Frères maristes et aux valeurs chrétiennes ». Mais c’est un détail.

    Comme CHAUVIN, Jean-Marc OUELLET a évidemment raison de « considérer les approches alternatives » et de dire que la « vérité » a besoin de toutes les visions ». Je ne mets pas de majuscule à « vérité », car il me semble qu’en sciences, elle n’est jamais « absolue » mais partielle et provisoire, un élément nouveau pouvant toujours survenir.
    Ainsi, à propos des « expériences de mort imminente », je suis prêt à reconnaître l’existence de phénomènes télépathiques, bien que non reproductibles à volonté, ou qu’un EEG plat n’est pas la preuve de la mort. La mort des cellules est en effet progressive, et celles du « cerveau archaïque » (tronc cérébral et certaines parties du système limbique) étant les mieux « protégées », ne meurent pas tout de suite lorsque le coeur s’arrête et que l’EEG est plat. Mais de là à en tirer la preuve de l’existence de « Dieu », comme l’ont fait certains neurphysiologistes canadiens croyants, dont Mario BEAUREGARD, il y a de la marge … !

    Mais « la « vérité » a-t-elle besoin de TOUTES les visions » ?
    Personnellement, je me refuse à mettre sur le même plan une théorie scientifique et une croyance, par exemple, bien qu’elle ne soit plus une théorie, l’évolutionnisme et le créationnisme. L’ « argument » jésuitique des créationnistes, estimant que deux « vérités » contradictoires sont conciliables parce qu’elles se situent à des niveaux différents (le comment et le pourquoi), n’est pas pertinent à mes yeux, et est même malhonnête intellectuellement.

    Il ne me semble pas qu’il faille « chercher une nouvelle théorie » (CHAUVIN). L’Evolution est un fait, bien qu’il soit évidemment impossible de reproduire expérimentalement , même en un siècle, un processus qui a eu lieu en des centaines de millions d’années.
    Par contre, à mon humble avis, il importe de prendre le temps de confirmer les observations évolutionnistes, de les préciser et de les corriger. Les lacunes actuelles des sciences (paléontologie, génétique, …) sont évidemment normales, et il est malhonnête, de la part des créationnistes, de tenter d’en tirer argument en faveur de leur croyance.

    Comme CHAUVIN, j’ estime que « la raison profonde (de l’opposition entre créationnisme et évolutionnisme) est dans l’opposition entre spiritualisme et matérialisme ». Il a évidemment raison de condamner les dérives évolutionnistes, telles que le « darwinisme social » (d’Hitler notamment). « La théorie qui veut que la sélection naturelle corrige les « défauts » des comportements ou la physiologie nous amène ni plus ni moins au finalisme le plus désuet ».
    De fait, je pense que l’Evolution agit, non pas sur les comportements, comme le prétend la sociobiologie, mais seulement sur les structures anatomiques puis fonctionnelles du néocortex préfrontal humain, lui permettant alors d’acquérir par l’éducation des comportements plus adaptés socialement.

    A propos du créationnisme, puis-je me permettre de joindre un texte par lequel j’exprime un point de vue inhabituel ?

    Pourquoi sont-ils créationnistes ? Ont-ils vraiment choisi de l’être ?

    Je regrette que, notamment, ni l’ouvrage de Rémy CHAUVIN « Le darwinisme ou l fin d’un mythe », ni la remarquable étude du CNRS à propos de l’évolutionnisme et du créationnisme
    http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/dosevol/decouv/articles/chap1/lecointreInter.html, aussi complète soit-elle, n’abordent pas la question de savoir pourquoi les créationnistes sont manifestement imperméables à toute argumentation rationnelle et scientifique.

    Je reconnais qu’à notre échelle moins que centenaire, il est difficile, et même quasi impossible, de se représenter une durée aussi longue que des millions d’années et donc le temps qu’il a fallu pour que la vie apparaisse à la suite de la chute d’une météorite, qu’elle se diversifie et quelle évolue, par adaptations, complexifications et mutations successives et aléatoires jusqu’à l’être humain.
    A fortiori, on peut comprendre que le génome, les prodigieuses capacités du cerveau humain, etc … paraissent inconcevables à certains sans l’intervention (ex nihilo , ? !) d’un « grand architecte » anthropomorphique et « créateur de l’homme à « Son » image ».
    Il y a aussi l’orgueil qui empêche les croyants d’admettre que l’être humain fait partie du règne animal, persuadés qu’ils sont d’avoir une relation privilégiée avec Dieu …

    La croyance créationniste, comme réponse immédiate et sécurisante à l’incertitude et aux lacunes actuelles des sciences, est d’autant plus compréhensible que, comme l’a dit avec raison, le pasteur évangélique Philippe HUBINON à la RTBF, :
    « S’il n’y a pas eu création, tout le reste s’écroule ! ». J’observe en effet qu’après l’âge d’environ 25 ans environ, il devient rare, voire impossible, d’encore parvenir à remettre en question ses options fondamentales, sans doute pour ne pas se déstabiliser, ou alors pour ne pas se désavouer. Certes, comme l’écrit Guillaume LECOINTRE, « la science est tout simplement non intentionnée. Pour autant, elle n’est peut-être pas dénuée de conséquences vis-à-vis de la philosophie ».
    En effet, les observations des neurosciences, en particulier, loin de chercher à prouver l’inexistence de dieu, tendent, me semble-t-il, à prouver son existence imaginaire et illusoire.

    Il ne faut évidemment rien attendre, si ce n’est a contrario, de certains pseudo scientifiques canadiens, largement financés par la Fondation chrétienne Templeton qui espère prouver scientifiquement l’existence de dieu !. C’est ainsi que, pour conforter sa propre croyance finaliste, Mario BEAUREGARD notamment, a sérieusement cherché dans le lobe temporal droit l’antenne, le récepteur que dieu y aurait placé pour recevoir sa « Révélation » . ! Non seulement ce neurophysiologiste a dû reconnaître qu’un tel récepteur n’existe pas, tout le cerveau étant concerné par l’attitude religieuse, mais il occulte totalement l’influence éducative et culturelle de l’éducation religieuse. Et pour cause puisqu’ il en a lui-même été une victime (inconsciente) …

    Mais est-il possible d’émettre des hypothèses explicatives, fussent-elles définitivement très partielles, sur l’origine et la fréquente persistance de la foi, même chez des scientifiques, par ailleurs souvent éminents ? Il n’est bien sûr pas question de vouloir simplifier ou réduire l’extraordinaire complexité du psychisme humain, et en particulier le phénomène religieux, à des « mécanismes » psycho-neuro-physio-génético-cognitivo-éducatifs. Pourtant, cette nouvelle approche permet déjà, à mes yeux, de relativiser la part de liberté individuelle.
    Comme l’a écrit le neurobiologiste Henri LABORIT :  » (…) Je suis effrayé par les automatismes qu’il est possible de créer à son insu dans le système nerveux d’un enfant. Il lui faudra, dans sa vie d’adulte, une chance exceptionnelle pour s’en détacher, s’il y parvient jamais.(…) Vous n’êtes pas libre du milieu où vous êtes né, ni de tous les automatismes qu’on a introduits dans votre cerveau, et, finalement, c’est une illusion, la liberté ! ». Finalement, ce qui importe, ce n’est pas tant CE que l’on pense, mais POURQUOI on le pense.

    C’est un fait d’observation sociologique : statistiquement, la liberté de croire ou de ne pas croire est souvent compromise, à des degrés divers, par l’imprégnation de l’éducation religieuse familiale, forcément affective puisque fondée sur l’exemple et la confiance envers les parents, et confortée par l’influence d’un milieu culturel, unilatéral puisqu’il exclut toute alternative laïque non aliénante et qu’il incite, à des degrés divers, à la soumission à une Vérité exclusive, et intolérante.
    L’éducation coranique en témoigne hélas à 99,99 %.

    La soumission religieuse s’explique : comme l’avait déjà compris Desmond MORRIS, en 1968, dans « Le Singe Nu », Richard DAWKINS estime, dans « Pour en finir avec dieu », que du temps des premiers hominidés, le petit de l’homme n’aurait jamais pu survivre si l’évolution n’avait pas pourvu son cerveau tout à fait immature de gènes le rendant dépendant, et totalement soumis à ses parents (et donc plus tard à un dieu … !).

    Dès 1966, le psychologue-chanoine Antoine VERGOTE, alors professeur à l’Université catholique de Louvain, a montré, sans doute à son grand dam, qu’en l’absence d’éducation religieuse, la foi n’apparaît pas spontanément, et que la religiosité à l’âge adulte en dépend. Son successeur actuel, le professeur Vassilis SAROGLOU, le confirme. Ce nouveau mécanisme de défense, animiste du temps des premiers hominidés, n’est apparu que grâce à la capacité évolutive du seul cortex préfrontal humain, à imaginer , grâce au langage et par anthropomorphisme, un « Père protecteur, substitutif et agrandi » , fût-il de nos jours qualifié, par rationnalisation, de « Présence Opérante du Tout-Autre »,(A. Vergote).

    Comme on pouvait le prévoir, des neurophysiologistes ont constaté que chez le petit enfant, alors que les hippocampes (centres de la mémoire explicite) sont encore immatures, les amygdales (celles du cerveau émotionnel) sont déjà capables, dès l’âge de 2 ou 3 ans, de stocker des souvenirs inconscients (donc notamment ceux des prières, des cérémonies, des comportements religieux des parents, …, sans doute reproduits via les neurones-miroirs du cortex pariétal inférieur. Ces « traces » neuronales, renforcées par la « plasticité synaptique », sont indélébiles …
    L’ IRM fonctionnelle confirme que le cortex préfrontal et donc aussi bien l’esprit critique que le libre arbitre ultérieurs s’en trouvent anesthésiés à des degrés divers, indépendamment de l’intelligence et de l’intellect, du moins dès qu’il est question de religion.

    On comprend que, dans ces conditions, certains athées comme Richard DAWKINS, ou certains agnostiques, comme Henri LABORIT, au risque de paraître intolérants, aient perçu l’éducation religieuse précoce, bien qu’a priori sincère et de « bonne foi », comme une malhonnêteté intellectuelle et morale. Bien que les religions, et a fortiori leurs dérives (guerres religieuses, inégalité des femmes, excisions, …) soient plus nocives que bénéfiques à tous points de vue, il va de soi que la foi restera toujours un droit élémentaire, mais d’autant plus respectable qu’elle aura été choisie en connaissance de cause, plutôt qu’imposée.

    Michel THYS à Waterloo. michelthys@base.be
    http://michel.thys.over-blog.org

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    • Alain Gagnon dit :

      Cher Monsieur Thys,

      Merci pour votre très intéressant commentaire. J’en tirerai matière à réfléchir, ainsi que plusieurs de nos lecteurs.
      Toutefois, je suis de ceux qui croient que la formation religieuse — malgré ses torts, je les connais bien… — ouvre l’intelligence et l’imaginaire, et accroit les possibilités d’auto-réalisation de la personne. Socialement, il m’apparaît abusif de réduire l’éducation religieuse à un anesthésiant. Les oppressions économiques, sexuelles et autres naissent du besoin de domination qu’ont instinctivement les humains ; à ce besoin, ils donneront le manteau de l’Islam, du Christianisme, du nazisme…
      Je voudrais aussi préciser que si Chauvin n’était pas darwiniste, il était farouchement évolutionniste.

      Au plaisir de vous lire bientôt,

      Alain Gagnon

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