Alain Gagnon : Une critique de Jakob, fils de Jakob dans Québec Français…

Alain Gagnon, Jakob, fils de Jakob, Éd. Triptyque.

 

Jakob, fils de Jakob

Cloisonnés dans un ghetto à la fin du second conflit mondial, Jakob Eliyakim et sa famille tentent de réinventer la vie. Cette tentative réussit presque, jusqu’à ce que les SS les empilent eux et leurs semblables dans des wagons jusqu’aux camps de la mort. Jakob s’abîme dans d’affreux cauchemars en constatant l’horreur de ce qui les attend. Mais, il échappe à ce cruel destin quand un colonel de la Wehrmacht l’adopte pour permettre à son fils malade de sourire à la vie. Jakob prend son rôle au sérieux tout en s’amourachant des sœurs aînées du garçon. Plus tard, les bousculades de la guerre chambardent leur quotidien. Fuyant à travers la campagne allemande après le pilonnage de leur ville, Jakob et Tandja croisent des SS dissidents et en mal de sexe… La jeune fille disparaît et Jakob quitte l’Europe. Des contacts fortuits le catapultent chez son oncle au Canada, contrée de tous les possibles. Sa culpabilité en bandoulière, il ne cesse de penser aux siens qui ont péri. Pour lui, sa survie va de pair avec leur mort. Néanmoins, le souvenir de sa famille et son amour pour Tandja l’escortent dans sa survie.

Écrivain à l’impressionnante liste de publications, Alain Gagnon signe ce roman avec un souci d’originalité apaisant. Contrairement à plusieurs livres qui abordent l’Holocauste, Jakob, fils de Jakob ne sombre pas dans l’ethnocentrisme. La trame psychologique du roman est très forte. Tout se passe dans la tête de Jakob. On assiste aux événements au moyen du traitement que l’adolescent en fait. Il est tiraillé entre sa joie d’être vivant et celle d’avoir trahi les siens. La narration est tellement efficace que le lecteur vit tous les silences de Jakob et le tiraillement qui ne le quitte jamais. Ce qui perpétue cet écartèlement, c’est l’omniprésence des citations de la Torah, comme des dizaines de voix qui s’échappent avec les fumées des crématoires.

Ariane Ouimet, Québec français, # 136

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